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Le black out, réflexions d’un Bourgmestre en demande d’infos…

Depuis plusieurs jours, les medias parlent d’un black out possible pendant l’hiver prochain : la Belgique est ramenée au rang des républiques bananières. Nous risquons d’être privés d’électricité ! INCROYABLE MAIS VRAI !

Je suis Bourgmestre et responsable de l’ordre public dans ma commune, mais c’est par la télévision et les medias que j’apprends que les Gouverneurs ont été informés et que les Bourgmestres seront chargés de la mise en œuvre des mesures sur le terrain.

C’est assez hallucinant car, comme tous les Bourgmestres, je ne suis au courant de RIEN.

Je vois des cartes dans la presse, sur RTL, sur RTBF, et… les cartes ne sont pas les mêmes !

Que penser ?

  1. Encore une fois, les Bourgmestres, qui ont un rôle majeur à jouer, sont considérés comme quantité négligeable. Même si nous en avons l’habitude, je pense qu’il faut maintenant le souligner aux yeux de l’opinion publique chaque fois que c’est possible : les communes jouent un rôle majeur mais n’ont rien à dire dans beaucoup trop de domaines ; les mesures nous sont imposées du « dessus » et, à un certain moment, que je pense atteint maintenant (et largement dépassé) cela met en péril certains éléments essentiels de l’équilibre de notre cohésion sociale ;
  2. Quelle  est la vraie question dans ce débat du black out ? Est-ce la question de savoir quelle commune sera touchée ? Est-ce de savoir si le black out durera 5 heures ou 24 heures ? … Non, la vraie question c’est : comment en est-on arrivé là ?
  3. Je demande en tant que Bourgmestre, garant de l’ordre public dans ma commune, une explication claire des autorités compétentes sur le sujet. A tout le moins, il me semble qu’une commission d’enquête parlementaire au niveau fédéral serait un minimum.
  4. Je me permets d’avancer quelques pistes de réflexion.
  5. Tout d’abord, l’autonomie énergétique est un problème stratégique majeur pour une collectivité, c’est une évidence, mais qui le rappelle ? On ne peut que s’interroger dés lors sur les privatisations dans le secteur, bien dans le sens du vent de la commission européenne, mais certainement pas dans le sens du vent des intérêts de la population.
  6. En effet, il est évident, me semble-t-il, que les sociétés productrices d’électricité ont entamé depuis plusieurs mois une opération de rapport de force vis-à-vis de l’Etat. Comment expliquer par exemple que les centrales gaz vapeur aient été démantelées à un rythme aussi vif ces dernières années ? A tel point qu’elles ont été rendues absolument inutilisables (même pour de potentiels acquéreurs), et ce de façon intentionnelle ? N’est ce pas une stratégie de la rareté pour faire céder l’Etat sur des revendications égoïstes, en prenant la population et les entreprises en otage ? Et ce qui est le plus surprenant, c’est que cette stratégie de démantèlement s’est déroulée au vu et au su de tous, et que les autorités publiques n’ont pas pu ou pas voulu réagir. Que se passe-t-il ?
  7. Dans la libéralisation du secteur, (comme c’est le cas, mutatis mutandis, dans bien d’autres secteurs), on a donné tout le pouvoir à des autorités chargées de la « régulation » des marchés, autorités indépendantes du pouvoir politique. Que font ces autorités ? Dans quelle mesure doivent elles rendre des comptes pour leur imprévoyance ? Dans quelle mesure leur responsabilité peut-elle être invoquée en cas d’accident(s) dû(s) à des ruptures d’alimentation en énergie ? Cette question est très générale : comment concilier l’intérêt général (représenté en démocratie par les autorités légitimes issues des élections au suffrage universel) et les pouvoirs/devoirs d’autorités technocratiques indépendantes ?
  8. Mais, en ce qui concerne le sujet de l’électricité, il faut peut être aussi comprendre les producteurs : comment investir pour la sécurité de l’énergie nucléaire quand, en permanence, certains lobbys (bien intentionnés sans doute) font constamment pression pour l’abandon du nucléaire ? Quel investisseur va risquer son argent dans une activité aussi incertaine ? Ce lobbying pour l’abandon du nucléaire porte à mes yeux une très lourde responsabilité dans la situation actuelle, qui, je ne vois pas comment il en serait autrement, va inévitablement se répéter.
  9. Le problème est donc complexe mais il est fondamental et mérite une explication sans tabous, en toute transparence.

L’autonomie énergétique, je le répète, est un problème stratégique majeur, tant pour les particuliers que pour les entreprises.

Il serait temps que ce problème soit examiné en profondeur, en mettant en lumière les rôles des uns et des autres, et donc, leurs responsabilités respectives.

 

Marc BOLLAND

Bourgmestre de BLEGNY

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