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Imaginer la Belgique de demain : un exercice difficile, mais indispensable

marcbolland2009Aujourd’hui, malgré la crise politique, le pays n’est pas complètement « sans pilote » car :

  • les institutions européennes sont depuis un certain temps en charge de la définition des règles économiques et de la gestion de la monnaie, devenue unique avec l’Euro ;
  • les pouvoirs fédérés (régions et communautés) travaillent et fonctionnent, et c’est d’autant plus important que les régions gèrent de larges compétences dans le domaine économique.

Néanmoins, la priorité politique est de former à court terme un gouvernement stable, qui pourra au niveau fédéral gérer les compétences fédérales.

La priorité est donc celle-là, à court terme.

Mais, en parallèle, l’actualité politique quotidienne nous interpelle quant à l’avenir de nos institutions.

Ne nous faisons pas peur inutilement : ce n’est pas l’avenir de la Belgique qui est en jeu. Au-delà d’autres raisons, une seule pragmatique, suffit : jamais aucun pays européen n’acceptera une modification de nos frontières. Nous sommes donc « condamnés »  à nous entendre, et, d’une certaine manière, c’est tant mieux.

Rien ne sert de revenir à des tremolos identitaires, sur le modèle, explicite ou implicite, des nationalismes du XIXème siècle. C’est inutile et dangereux.

La question n’est pas de se dire : « Est-ce que j’aime la Belgique ? ».

Personnellement, j’aime une Belgique : celle du sens de l’humour, des moules frites, de la créativité artistique, du pragmatisme, du sens du compromis, d’une certaine manière de vivre le multilinguisme,…

Mais je constate comme beaucoup d’autres, compte tenu de l’actualité de ces dernières années, qu’il est indispensable de trouver une autre organisation des pouvoirs publics. Le seul rôle des institutions, c’est d’être utile. Et pour être utile, il faut fonctionner efficacement.

Un fait vaut mieux qu’un lord maire : il faut bien constater que la Belgique, dans sa configuration institutionnelle actuelle, est de plus en plus souvent et de plus en plus profondément dans l’impasse.

Peu importe à la limite de savoir à qui la faute : c’est un fait. Et il faut donc en tenir compte.

Les wallons doivent donc évidemment contribuer à mettre en place à moyen terme un modèle plus efficace. Avec pragmatisme.

Quelles sont les données de base ?

  • la Belgique demeurera : il est impensable que des frontières soient modifiées au cœur de l’Union européenne ; les autres pays européens ne l’admettront pas, car cela risque de causer chez eux des effets collatéraux ;
  • l’Union européenne gère d’ores et déjà la plupart des grandes décisions économiques ;
  • le fait régional doit être affirmé ; tant pour la Wallonie que pour Bruxelles.
  • nous devons essayer de profiter davantage de notre position au centre de l’Europe et de la proximité de voisins auxquels nous pourrions nous ouvrir davantage.

Que pouvons nous faire ?

Pas besoin de grands discours ou de grands projets. Restons pragmatiques.

Mais afin d’avancer concrètement vers une architecture institutionnelle viable à moyen terme, mettons en œuvre ce qu’il est possible, en veillant à ne pas contrarier le court terme, à savoir la constitution rapide d’un gouvernement fédéral qui puisse traiter les matières socio-économiques.

Je propose 3 actions concrètes, qui me semblent réunir ces conditions et que peuvent décider seules les autorités wallonnes ou de la communauté française :

1) approfondir le concept de « fédération wallonie-bruxelles » : ce concept permet de renforcer le fait régional, tant à Bruxelles qu’en Wallonie. Et il est inscrit clairement dans la déclaration de politique régionale et dans la déclaration de politique communautaire, même si son contenu n’est pas défini.

Une piste pourrait être la suivante :

  • les régions devraient gérer en propre toutes les compétences, ou en tout cas le maximum d’entre elles.
  • la fédération serait le lieu de contact et de coordination, mais aussi de solidarité.
  • le « parlement de la communauté française », actuellement composé de parlementaires issus des parlements wallons et bruxellois, devrait être à cette image et pourrait être remplacé par une forme de « sénat de fédération », qui ne siégerait qu’en cas de besoin. Celui-ci pourrait se saisir de certaines matières régionales par droit d’évocation. Il pourrait être composé pour partie de parlementaires des régions, mais aussi de représentants des provinces d’une part, et des communes d’autre part. Ce type de composition renforcerait sa fonction de coordination de nos pouvoirs publics

2) adopter la convention du conseil de l’Europe sur la protection des langues minoritaires.

Les francophones réclament depuis longtemps de façon unanime cette adoption. Son adoption au sein de la zone d’influence de la communauté française serait plus restreinte qu’une adoption sur l’ensemble du territoire belge, c’est évident, mais elle constituerait un symbole important.

3) sur le plan de la diplomatie, celle-ci doit rester principalement une diplomatie économique : nos relais à l’étranger doivent contribuer à la réussite économique de nos régions.

Néanmoins, en parallèle, il serait judicieux de demander à nos fonctionnaires de réexaminer l’ensemble des traités nous unissant à nos voisins et de présenter une note d’orientation précisant l’opportunité et la possibilité d’élargir et d’approfondir ces traités de façon bilatérale, dans le cadre de nos compétences.

La Wallonie et Bruxelles devraient ainsi pouvoir renforcer leur place au centre de l’Europe et s’adosser davantage dans certaines matières à nos voisins proches, en élargissant leur capacité d’action dans un schéma à géométrie variable.

Ces réflexions ne sont que quelques propositions concrètes à un débat dont les wallons ressentent de plus en plus le besoin, afin d’assumer davantage leur destin.

Ce débat ne pourra avancer que s’il demeure fondé sur des bases pragmatiques, s’il s’appuie sur des propositions concrètes et réaliste, et s’il s’effectue dans le respect des autres communautés de la Belgique.

Marc Bolland
Député wallon

21-10-2010

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